L’usage de l’alcool est très fréquent dans notre culture et est ancré dans les moeurs. Aujourd’hui, la France est l’un des premiers producteurs d’alcool au niveau mondial. Il représente un objet de fierté nationale et fait partie de l’identité des Français. L’alcool est souvent utilisé comme médiateur de relations humaines et est synonyme de convivialité, de fête. Il procure du plaisir par son goût, ses vertus désinhibitrices permettent une autre forme d’expression du moi.
Cependant la santé publique se préoccupe de plus en plus des effets nocifs de l’alcool, de l’alcoolisme. Les autorités se trouvent placées au carrefour de différentes revendications. Certains défendent les intérêts des producteurs, soutenant l’apport économique de ce produit pour le marché français ; tandis que d’autres défendent la logique de santé publique. L’alcoolisme fait de plus en plus de bruit. Des réglementations par le biais de la loi Evin de 1991 sont mises en place. Une nouvelle discipline, à savoir, l’alcoologie, a été créée. De nombreux réseaux de professionnels se déploient peu à peu.
Les personnes alcooliques représentant des figures inquiétantes pour le socius font aujourd’hui l’objet de maintes tentatives de catégorisation qui témoignent de la complexité de cette problématique et de la volonté des experts de les placer dans un espace évitant tout débordement. Leur statut a évolué depuis le siècle dernier. Elles sont passées du statut « d’ivrogne » à celui de malade alcoolique. Des centres de soins spécialisés ont vu le jour. Nous assistons à un foisonnement de structures traitant de l’alcoologie, des addictions dans un champ plus large. Cette médicalisation permet, semble-t-il de traiter l’angoisse sociale et est moins stigmatisante pour la personne alcoolique. Ces nouvelles structures participent à l’inclusion de ces personnes dans notre société. L’alcoolisme a pendant longtemps été reconnu comme un vice. Il est encore considéré comme une déviance par à rapport à la norme sociale conventionnelle.
Comme l’explique Coulombier (2007), à partir de nos représentations autour de l’alcool, des normes se sont construites. Celles-ci se transmettent, elles ne sont pas naturelles mais culturelles. Par exemple, on dit souvent que l’alcoolique boit trop, il y aurait donc un « boire normalement ». Ce « boire normalement » ce serait nous. Ne pas boire non plus, ce n’est pas normal. Une personne qui ne boit pas doit se justifier. Les « bons vivants » sont plutôt appréciés alors que les personnes abstinentes provoquent de la méfiance. L’alcoolisation n’est pas interrogée, elle devient problématique quand elle n’est plus maîtrisée, quand elle est différente des habitudes du milieu culturel. On entend dire aussi que l’alcoolique consomme des mauvais alcools, on ne s’imagine pas qu’un alcoolique puisse apprécier les bon vins, qu’il boive des alcools fins. Dans nos représentations, les femmes consomment des alcools moins forts que les hommes. Par exemple, si un homme prend un vin cuit on lui dira sur le ton de la plaisanterie « ah, tu prends un truc de bonne femme ! » Dans nos représentations, l’alcoolique ne nous ressemble pas, c’est l’autre, notre opposé…
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