L’anorexie reste au centre des troubles du comportement alimentaire et touche principalement la jeune fille (environ 10 filles pour un garçon) entre 16 et 22 ans.
Nous devons distinguer l’anorexie mentale vraie (l’amaigrissement est le but à atteindre à tout prix), de l’anorexie mentale secondaire où la fonction alimentaire revêt des significations dangereuses et ou l’amaigrissement est secondaire.
Souvent l’anorexie débute par une envie particulière de maigrir qui s’installe soit progressivement, soit au contraire sur un coup de tête. L’amaigrissement peut passer inaperçu au regard de l’environnement familial et même être renforcé par des remarques flatteuses sur la volonté de maigrir de la jeune fille. Les parents de l’adolescente commencent à s’inquiéter lorsque l’amaigrissement devient considérable et lorsque l’aménorrhée survient sans cause médicale objective. A la restriction alimentaire, peut s’ajouter l’hyperactivité, des vomissements provoqués ou la prise de purgatifs. L’aménorrhée (l’arrêt des règles) est souvent le premier motif de la consultation. Le lien entre ces deux symptômes (perte d’appétit et arrêt des règles) montre l’impact des effets de la dénutrition sur le corps biologique.
A ce stade de la maladie et avec l’aide d’un psychothérapeute, ces anorexies « débutantes » vont s’améliorer sans évoluer vers une anorexie secondaire vraie. Ces désordres alimentaires sont souvent représentatifs de conflits parents/adolescentes, de combinaisons de facteurs psychologiques, interpersonnels et sociaux et d’un besoin de répondre à des normes culturelles qui valorisent la minceur.
Pour d’autres adolescentes, dans le cas d’anorexie secondaire, la perte de poids reste toujours insuffisante. Le désir de maigrir est alors sous-tendu par la hantise de grossir, chaque prise de poids entraînant culpabilité et remords. En perdant du poids, pour la première fois la jeune fille va sentir qu’elle possède un pouvoir sur elle-même, sur son corps et sur son environnement. Pourtant, se détériorent son état physique, l’estime de soi ainsi que son équilibre émotionnel. La période d’état s’installe alors, associant trois signes caractéristiques de l’anorexie mentale : Anorexie, Amaigrissement, Aménorrhée.
L’anorexique qui a de bonnes capacités intellectuelles, continue à rationaliser ses comportements, et ne se perçoit pas comme maigre. Il existe une dénégation de l’image corporelle. Elle considère l’amaigrissement comme une récompense de la lutte contre son corps.
Il n’est pas rare d’observer une alternance de phases boulimiques et de restrictions sévères chez la même adolescente.
L’anorexie masculine, même si certains auteurs la décrivent comme identique dans l’évolution à celle de la fille, est souvent caractérisée par des symptômes plus prononcés et peut évoluer vers un moins bon pronostic. Cela peut être lié au fait qu’elle est traitée plus tardivement puisque par l’absence d’aménorrhée le diagnostic est rendu plus difficile.
Le corps est au centre de la plupart des conflits de l’adolescent. Pour parler du corps, il est important de distinguer le schéma corporel: terme à connotation neurophysiologique de l’image de corps qui appartient, quant à elle, au registre symbolique et à l’imaginaire.
Les limites corporelles sont acquises, dès le plus jeune âge, dans la relation de l’enfant à sa mère. L’enfant apprend à l’occasion des expériences de contacts sécurisants avec sa mère (jeux, bain, massages…), à acquérir la notion d’une limite entre l’intérieur et l’extérieur et ainsi à ressentir la délimitation de son enveloppe corporelle.
Ces adolescentes ont une fausse image de leur corps : la perception qu’elles en ont est loin d’être objective et même quasi délirante : elles sont comme aveugles à la réalité de leur apparence. Ceci nous montre la complexité de l’anorexie. La crainte de grossir entraîne de véritables rituels tels que des pesées fréquentes, des calculs de la valeur calorique des aliments, des mesures du corps et une hyperactivité qui l’épuise physiquement.
Elles sont également dans le déni de la gravité de la maladie quelles auto-entretiennent.
A l’adolescence, le corps est au centre des échanges affectifs entre individus d’où l’importance de l’apparence et des normes sociales. L’adolescent vit dans la pression sociale normative et ne cesse de s’interroger sur « ce qui est normal » et sur « ce qu’en pensent leurs pairs ». Les jeunes ont envie d’appartenir à un groupe, ce qui les aide à entrer dans le monde des adultes. Les jeunes anorexiques qui pourtant s’épuisent à maigrir pour répondre à leurs exigences physiques, ont des relations très pauvres avec leurs pairs et souvent même, s’en isolent.
Les problématiques centrées sur le corps ont pour premières particularités de mettre en avant la définition du corps sexué. Les troubles du comportement alimentaires peuvent être une mise à distance de la sexualité, du refus de la transformation et des bouleversements corporels.
Sur un plan plus psychopathologique : l’on repère l’expression d’un besoin de maîtrise et d’une capacité à régresser à un stade de satisfaction pulsionnelle antérieur (l’oralité a une place majeure du fait qu’elle réunit, dès la naissance : le corps, le comportement alimentaire, le manque, le plaisir et la relation à la mère). L’on remarque également la défaillance d’une identité corporelle définie et autonome.
De plus, ces jeunes filles ne savent pas identifier ce qui pour d’autres est instinctif : la sensation de faim ou de satiété.
La boulimie
La boulimie est également un désordre alimentaire d’origine névrotique. Elle apparaît comme une conduite régressive et se manifeste sous forme de crises compulsives. Même sans faim, les boulimiques se sentent contraints d’avaler très rapidement et d’une façon chaotique, des aliments en quantités énormes. Ces crises arrivent lorsque l’adolescent est seul, qu’il se sent vide. Il mange sans plaisir et ressent ensuite du dégoût qui le conduit à revomir tout ce qu’il a ingurgité. Il s’ensuit un sentiment d’angoisse, de malaise, d’humiliation et de culpabilité.
Ces crises sont fréquentes également chez les anorexiques : après la restriction permanente succède boulimies et vomissements. La compulsion à s’alimenter l’apparente à des conduites toxicomaniaques. Boulimiques et anorexiques sont toutes deux obsédées par le nourriture. La différence est que l’anorexique réussit à garder le contrôle, ce qui n’est pas de cas de la boulimique. Cependant, certaines boulimiques/vomisseuses sont parfois aussi maigres que les anorexiques les plus gravement atteintes.
Ce qui semble général dans le discours de ces jeunes adolescentes: c’est que la boulimique a une image d’elle bien plus dévalorisée que l’anorexique qui refuse bien souvent de se remettre en question.
Les crises boulimiques sont, par contre rares chez les obèses.
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